Ceci est un billet estampillé « bouquins » et pas « séries » ; je ne vais donc pas vous parler de la série, mais bien d’un roman du même nom. Homeland est un bouquin de Cory Doctorow, et constitue la suite du très sympathique Little Brother. Je ne vais pas vous reparler de l’auteur ni du mode de distribution de ses livres ni des références à des librairies dans chaque chapitre, ça c’est la même chose que dans le billet sur Little Brother.
Homeland nous remet face à Marcus, quelques années après les événements du précédent bouquin. Il a un peu grandi, est moins ado et plus jeune adulte. Et on le retrouve au Burning Man ; d’ailleurs le livre commence comme une véritable fête aux geeks, mêlant des pans de culture fascinants avec dès les premières pages le Burning Man donc (un jour j’y irai), mais aussi l’EFF, Will Wheaton et D&D. Au milieu de toute cette folle agitation, de ce pur événement de contre-culture, Marcus va à nouveau se retrouver plongé dans un truc bien plus gros que lui, une terrible machination. A partir de là, il va tenter de tailler sa route au milieu des forces plus ou moins officielles qui sont à ses basques, et il va utiliser tous ses talents de hacker (au sens noble du terme) pour s’en sortir.
Cory Doctorow cherche encore une fois à ouvrir les yeux de son lectorat. Les menaces ont changé, elles sont devenues moins officielles et sont davantage ancrées dans le milieu privé, dans un complexe paramilitaro-économico-espionnito-parano-dangereux. Les armes aussi ont évolué par rapport à Little Brother, avec une mise en avant d’outils comme Tor. Et l’auteur, avec toute sa connaissance de ces phénomènes, nous dresse un superbe catalogue des actions possibles pour attaquer et/ou défendre la vie privée et la liberté d’expression.
Et c’est bien là que le bât blesse, car le livre est presque plus un catalogue qu’un vrai roman. Franchement, l’action reste réduite à la portion congrue et il ne se passe finalement pas grand chose. Le héros ne fait que subir et ne peut jamais réellement agir ; certes, si c’est pour nous montrer la force de la machinerie en face, c’est réussi, mais du coup on se sent moins pris dans le livre. De même, la fin est ultra-rapide, bâclée, avec un Deus ex machina difficilement acceptable. Et c’est bien dommage.
Le fonds du livre mériterait d’être connu, en parallèle à toutes les révélations Snowden-PRISM-Wikileaks et autres. Le grand public y gagnerait sans doute. D’autant qu’on y trouve à un ou deux endroits des passages sur la vulgarisation de tout ça, le fait de se rendre compte que non, Tor et autres ne sont pas accessibles à l’utilisateur d’ordinateur lambda, etc. C’est très bon, il y a de superbes idées. Mais le livre est finalement un tel catalogue geek que les personnes qui mériteraient de le lire n’iront sûrement pas très loin. On se retrouve avec un bouquin le cul entre deux chaises. Les vrais geeks passionnés un peu hackers intéressés seront déjà au courant de la plupart des éléments à retenir. Alors que le plus large public sera probablement rebuté par les aspects techniques parfois développés sur de longues pages. Trop ou pas assez geek finalement. Et c’est bien dommage car le fonds mérite d’être développé et distribué et lu et connu.
Je suis très partagé après cette lecture. Autant j’apprécie beaucoup Doctorow et ses idées, ses positions, sa volonté de faire connaître tout ça, autant je suis déçu du livre en lui-même ; mal positionné et avec une histoire faiblarde, Homeland n’est pas à la hauteur de mes attentes. En même temps, vu que vous pouvez le télécharger gratuitement sur le site de l’auteur, faites-vous votre propre opinion, ça ne mange pas de pain.