Et hop, c’est reparti pour une petite revue de jeux de société découverts ces derniers temps. Comme d’habitude, je n’ai pas passé 10’000 heures dessus en jouant un nombre incalculable de parties. Mon avis se base sur quelques petites parties et mon ressenti personnel. Alors hop on y va avec deux jeux qu’ils sont biens…
Codenames
Nouvelle sortie de Vlaada Chvatil (auteur tchèque au joli CV avec des titres comme Dungeon Lords/Petz, galaxy Trucker, mage Knight, Pictomania ou Through the Ages), cette traduction de 2016 est celle d’un jeu de 2015. Qualifié parfois un peu vite de party game, il en a quand même certains aspects : règles vite expliquées, parties plutôt rapides, ambiance déconne, et envie d’en refaire une là tout de suite. Mais Codenames met les neurones à bien plus rude épreuve que la plupart des party games, sans pour autant être une torture.
Sur la table figurent 25 cartes en un carré de 5×5 avec sur chacune un mot. Autour de la table, deux équipes : les espions rouges et les espions bleus. Dans chaque équipe, un maître-espion est désigné ; ils prennent place d’un même côté de la table, face à leurs équipes respectives. De plus, les maîtres-espions ont devant eux une carte révélant à quoi correspondent les 25 cartes ; car oui ces 25 cartes sont les noms de code de gens parmi lesquels il va falloir retrouver les espions de son équipe, en évitant les innocents neutres, les espions adverses, et surtout le terrible assassin. Et comment va-t-on faire cela? Et bien chacun à son tour, les maîtres-espions vont donner un indice à leur équipe. Le maître-espion va donner un mot et un chiffre. Ce mot est censé faire des liens avec une ou plusieurs des 25 cartes sur la table, et pour lui le mot fait référence au nombre de cartes qu’il indique. Son équipe va ensuite délibérer, discuter, pour tenter de trouver à quel(s) cartes(s) le maître-espion fait référence. Ils vont en citer un et le maître-espion va poser une tuile dessus pour répondre ; si c’est une tuile de la couleur de l’équipe, tant mieux on a trouvé un de nos espions ; si c’est un blanc, neutre, dommage, notre tour est fini ; si c’est un espion de la couleur adverse, notre tour s’arrête aussi et on aura aidé l’autre équipe ; et si c’est l’assassin, on a perdu. Si on a trouvé un espion de notre couleur, on peut continuer et tenter de deviner autant de tuiles que le nombre exprimé par le maître-espion. Ce dernier reste impassible et neutre tout au long du jeu pour ne pas donner d’indications autres que ses mots et nombres aux joueurs. La partie se termine quand une équipe a trouvé tous ses espions (elle gagne) ou quand une équipe tombe sur l’assassin (elle perd).
On est donc dans un jeu « à la Pyramide » (le jeu télé de l’époque), où on doit faire deviner des mots avec d’autres mots. Un principe d’association d’idées, parfois complètement délirantes, pouvant partir en private jokes et gros délires ; et comme chacun fonctionne différemment dans sa tête… Oui mais pas que. Parce que d’une part il faut éviter de faire dire à notre équipe les mots correspondants aux cartes neutres, encore moins ceux correspondants à l’équipe adverse (puisqu’on l’aide ainsi), et encore moins l’assassin ; le choix des mots doit être suffisamment fin pour ne pas faire commettre d’erreur. Mais qui dit trop fin dit faire découvrir un seul mot à la fois. Or on ne peut pas compter gagner ainsi, pour l’emporter il est nécessaire de tenter de faire découvrir plusieurs mots avec un seul indice ; et là évidemment ça se corse et il faudra savoir choisir ses indices de la meilleure des manières. C’est là que l’aspect party game s’efface pour laisser la logique et la réflexion prendre le pas. Et c’est ici que Codenames dévoile toute sa finesse.
J’ai testé Codenames avec 2 équipes de 3 et 4 joueurs, donc pas mal de monde ; cela donne une très bonne ambiance et de jolis débats entre espions pour comprendre à quoi le maître-espion fait référence avec son indice. Mais il peut tout aussi bien se jouer à 2 (en coopératif), 3 (un maître-espion donnant des indices respectivement à chaque espion), ou beaucoup plus (mais là ça risque de devenir le gros bordel au sein des équipes pour se décider), avec des ambiances très différentes. Et puis le jeu a tellement plu et fait le buzz dans le milieu ludique que les variantes pleuvent. Tout le monde y va de ses propres cartes, de ses paquets thématiques, allant jusqu’à utiliser des images (une version officielle avec images semble pointer son nez d’ailleurs). Déjà que les nombreuses cartes de mots (recto-verso) et les différentes cartes pour les maîtres-espions donnent une rejouabilité énorme au jeu, on n’est pas prêt de s’ennuyer avec Codenames.
J’ai franchement beaucoup aimé le jeu. En tant qu’espion, on a une tension énorme pour en pas se planter de carte, pour choisir le bon mot, éviter l’assassin, discuter avec les collègues pour se mettre d’accord (et dans l’ambiance que l’on avait, pour éviter aussi de se faire débilement influencer par l’équipe adverse qui aligne les associations d’idées foireuses). En tant que maître-espion, avec toute la réflexion autour du choix de l’indice, suffisamment clair mais pas trop pour permettre d’indiquer plusieurs mots mais pas les mauvais (un petit côté Dixit là d’ailleurs). Je sens qu’il va ressortir plus d’une fois. Et en plus même ma copine a bien aimé, ce qui est assez rare dans le domaine ludique.
Mysterium
Souvent présenté comme un mix de Cluedo et Dixit, Mysterium a un peu de ces deux jeux oui mais plus aussi, il a vraiment son propre style, son ambiance. Il s’agit ici de la traduction chez Libellud du jeu ukrainien (eh oui encore un jeu d’Europe de l’est) de Oleg Sidorenko et Oleksandr Nevskiy (il semblerait que des différences de règles aient été instaurées entre les deux versions mais bon je n’ai jamais touché à la VO, donc voilà). Ici on a un groupe de mediums se rendant dans un manoir hanté où un crime a eut lieu. C’est le fantôme de la victime qui hante les lieux et il va tenter par ses moyens limités de révéler les conditions du meurtre aux mediums. Dans ce jeu coopératif, il faudra donc retrouver l’identité du meurtrier, le lieu du crime et l’arme utilisée (genre « le colonel Moutarde dans la bibliothèque avec le chandelier, eh oui). L’un des joueurs va donc endosser le rôle du fantôme et se placer derrière le magnifique paravent, tandis que les autres vont chacun se glisser dans la peau de l’un des mediums en quête de vérité ; la seule différence entre les médiums étant leur couleur et leur apparence, pas de capacités spéciales ou autres. Et dans les 7 heures que dure la nuit, ils devront tous découvrir la réponse aux 3 questions, sinon ils auront perdu.
Dans une première partie du jeu, chaque medium va tenter de composer un groupe de suspect, lieu potentiel et arme possible. On a sur la table un certain nombre de cartes pour chaque catégorie (nombre dépendant du nombre de joueurs et de la difficulté de la partie souhaitée). De son côté du paravent, le joueur fantôme a les groupes des trois éléments pour chaque joueur. En utilisant des cartes, il va tenter d’indiquer à chaque joueur comment faire sa sélection. Ces cartes sont comme des visions que le fantôme fait passer au medium, et du coup elles sont oniriques, étranges, bizarres, et demandent une certaine dose d’interprétation (là c’est l’aspect Dixit). Chaque joueur va alors indiquer quel suspect il pense être le coupable ; les joueurs peuvent (doivent même) coopérer, communiquer, échanger. Ensuite le fantôme révèle qui a raison ou tort. En cas de succès, on passe à l’étape suivante, le lieu. Sinon on repasse un tour (soit une heure de la nuit) sur les suspects. C’est ensuite au tour de l’arme, toujours de la même manière. A chaque tour, on peut parier si on pense que les autres joueurs se trompent ou ont raison, histoire de gagner de petits bonus pour la suite.
Si chaque joueur a son groupe de suspect/lieu/arme avant la fin des 7 tours, on passe à la phase suivante (sinon c’est perdu). Grâce à ses cartes visions, le fantôme va devoir nous indiquer quel groupe coupable/lieu/arme est le bon. Il a droit à 3 cartes mais si on a trop traîné en route, on n’aura pas le droit de les voir les trois. Avec ces dernières révélations, les joueurs votent pour tenter de tomber juste. Si ils y parviennent, tout le monde gagne ; sinon c’est la loose pour tout le monde.
Mysterium est un jeu très prenant, avec une ambiance géniale. La qualité du matériel de Libellud y contribue grandement. Les illustrations sont magnifiques, autant le paravent, que les cartes suspects/lieux (les armes aussi mais un peu trop petites), et les cartes de visions du fantôme, jusqu’à la petite horloge servant de compte-tours. Le tout permet vraiment une bonne immersion. Et puis le jeu est prenant, tendu. On a vraiment envie de réussir et on est vite happé par l’intrigue de ce meurtre mystérieux. Vous l’aurez compris, j’aime beaucoup. Et je vous le conseille. a noter qu’il est jouable jusqu’à 7, et qu’il prend vraiment son sens à pas mal de monde, il ne me semble pas très intéressant à peu.