Dans un futur pots-apocalyptique dur, gris et froid, un homme s’aventure avec son fils le long de la route qui doit les mener à un endroit où tout va mieux. C’est leur destin que ce film (tiré d’un roman que je n’ai pas lu) va nous faire découvrir. Au travers de décors magnifiques et d’un rendu post-apo grandiose, la relation père-fils va être un élément central, la seule chose les séparant des terribles tueurs que tant de gens sont devenus. Contre les éléments et les hommes, contre l’environnement et contre des groupes de personnes, l’enfant va suivre un voyage initiatique qui le conduira à devenir lui-même un homme. Ce film est très dur, la joie est quasiment absente, le ton est gris et dur comme le monde, froid, mordant, une vision si sombre de l’avenir et de l’espèce humaine. Et pourtant le tout est si prenant, si terriblement humain et proche de nous. C’est un gros choc, brutal comme un coup dans la gorge qui vous coupe la respiration, ne vous laissant la reprendre qu’une fois au générique.
On est dans le post-apo. Et même s’il y a des méchants, il ne faut pas s’attendre à du Mad Max. Du cataclysme on ne sait pas grand chose, on en aura quelques bribes par les flashbacks qui émaillent le film. Avec les nuages et la pollution est venu le froid, et les besoins en feu et chaleur. Les infrastructures qui lâchent. Faune et flore qui disparaissent. Le manque de nourriture. Le cannibalisme dès lors. Et la disparition des autorités laissant libre cours aux gangs de dangereux survivants qui délaissent leur humanité. Au milieu de ces horreurs, quelques personnes qui tentent de rester elles-mêmes. Comme ce père, qui garde pour tout lien avec l’humanité l’amour pour son fils et les valeurs qu’il tient à lui inculquer, dans le but de faire de lui un homme bien. On ne saura jamais leurs noms, d’ailleurs aucun personnage n’a un nom. Ce sont juste des gens, des humains, représentants génériques de valeurs et d’attitudes. Un grand tout symbolique, qui devient le combat de résistance de l’humanité face à la sauvagerie. Ne pas personnaliser les héros, ne pas leur donner de nom, ce choix leur donne une portée bien plus grande, permettant de toucher plus de monde. En cela, ce film s’avère très fort, et on se prend à se demander quels choix nous aurions faits à la place de cet homme. Des choix, il doit en faire, souvent difficiles, laissant leur marque sur sa conscience, forgeant par là-même le caractère du fils.
Avec ses décors superbement rendus d’un monde post-apo, La Route s’avère une réussite visuelle de grande qualité. L’ambiance est réellement au rendez-vous et tout concourt à rendre le désespoir de ce monde. Le son soutient cette ambiance lourde, menaçante, pleine de menaces insidieuses. Et puis il y a ce jeu d’acteurs. Viggo Mortensen est très très bon, pris entre son désespoir, la perte de son épouse (tragiques et poignants flashbacks), et sa volonté de permettre à son fils de s’en sortir (tout en sachant que lui-même ne s’en sortira pas). le jeune Kodi Smit-McPhee est aussi superbe dans la position de l’enfant devenant homme, suivant les pas de son père et en retirant tout ce qu’il peut ; vu comme l’ange divin qui seul permet au père de rester humain et de ne pas sombrer, son innocence sera mise à rude épreuve. Les autres rôles sont relégués au second plan, avec des apparitions souvent bien courtes par rapport aux deux personnages principaux. Mais les prestations de Charlize Theron (ah ce flashback où elle disparaît), Robert Duvall, Guy Pearce ou encore Michael K. Williams sont vraiment de qualité et ajoutent au film. Aucun n’a jamais de nom, tous deviennent des généralités, des émanations de principes ou de clichés.
Un film très dur, loin des clichés du post-apo bourré d’action et de testostérone. Ce film touche. Il est profond, réfléchi. Il est prenant. Me touche-t-il davantage parce que je suis père moi-même? Je ne sais pas mais je l’ai trouvé poignant. Fortement chargé en émotion, avec une fin particulièrement sombre, bien qu’attendue, ce film est une belle réussite. J’ai beaucoup aimé.