Et c’est reparti pour un petit billet de jeux que j’ai bien envie de vous présenter parce que je les aime bien. Il s’agit là de deux acquisitions relativement récentes de cette année et qui tournent pas mal du tout, dans des styles assez différents.
Fourberies
Sorti au printemps pour Cannes, ce jeu de Bruno Cathala et Christian Martinez , très joliment illustré par Jérémie Fleury, mérite un petit éclaircissement quant à son titre ; même si on peut y effectuer quelques petites manigances et retournements de situation, il est un chouilla abusif de l’appeler « Fourberies », ce n’est quand même pas le cœur du jeu et il y a bien pire dans ce domaine du jeu de salopiauds. Ce qui ne veut pas dire qu’il n’est pas bien, juste que le titre est peut-être un peu trompeur AMHA.
Revenons à nos moutons en ouvrant la boîte qui propose un fort beau matériel avec ses figurines de qualité, son petit théâtre en 3D à monter (pas autant de boulot que pour le train de Colt Express mais quand même un peu), ses cartes et son plateau très joliment illustrés ; le monde de ces animaux anthropomorphes dans le domaine du théâtre n’est pas sans rappeler l’excellente BD De Cape et de Crocs (c’est un compliment), ce qui met dans l’ambiance. Bref, du matériel de qualité, comme Bombyx en a l’habitude (j’ai eu l’occasion de le découvrir en version surdimensionnée à Cannes et c’était vraiment beau, même si les figurines imprimées en 3D avaient de la peine et que certaines avaient été abimées lors des premiers jours du salon). On va donc donner à chaque joueur une série de figurines (caravelles et régisseurs) ainsi qu’un tas de cartes à sa couleur. On pose le plateau et le théâtre au centre de la table. Ici, chaque joueur prend en main le destin d’une compagnie de théâtre qui va circuler entre différentes cités afin d’y recruter des acteurs ou des ménestrels ; le but est de monter un spectacle de qualité en fonction de l’humeur du roi, ce dernier pouvant pencher vers la comédie ou vers la tragédie. En engageant les bons acteurs, en influençant l’humeur du roi et en usant de certains personnages, les joueurs vont gagner un certains nombre de sous (des écus), le plus riche après deux saisons l’emporte.
Au début d’un tour de jeu, on va déposer une carte de la pioche « rencontres » en-dessous de chacune des huit cités du plateau, indiquant qui s’y trouve à recruter pour le moment. Une saison se termine quand on est arrivés au bout de la pioche. Chaque joueur va ensuite secrètement choisir dans sa main une carte représentant l’une des villes. Lorsque tout le monde a choisit, chacun place l’une de ses caravelles sur la ville en question. On résout ensuite chacune des villes dans l’ordre de la manière suivante :
- Si plusieurs joueurs sont sur la même cité, les cartes qui s’y trouvent sont défaussées. Les acteurs ainsi défaussés influencent l’humeur du roi (les tragédiens poussent vers la tragédie, plus ou moins en fonction de leur niveau, les comédiens font de même dans le sens de la comédie). De plus, chaque joueur concerné pioche une carte « demande secrète » qu’il va garder face cachée ; il s’agit d’objectifs spéciaux permettant de gagner des écus en fin de saison et qui peuvent orienter la stratégie du joueur.
- Si un seul joueur est sur une cité, il peut prendre toutes les cartes rencontres qui s’y trouvent (ben oui si personne n’est venu sur la cité au tour précédent, elle aura une carte du tour précédent et une deuxième posée au début de ce tour, donc on peut prendre plusieurs cartes). Il les pose devant lui. Il y a là des acteurs de divers niveaux, tragédiens ou comédiens, ainsi que des ménestrels avec des pouvoirs particuliers qui pourront être activés en cours de partie. Les acteurs ont aussi des capacités spéciales, comme voler des sous à un autre joueur, ou permettre de récupérer ses cartes déjà jouées, voir de poser un régisseur sur le théâtre, ce qui rapporte des sous (mais ces régisseurs seront évacués si le roi change d’humeur). Le joueur peut défausser l’un des acteurs acquis, qui ira ainsi influencer l’humeur du roi.
Ensuite, on commence un nouveau tour, en replaçant une carte sur chaque cité. Tant qu’un joueur a sa caravelle sur une ville, il ne peut pas y retourner ; d’ailleurs il ne reprend pas en main la carte de cité choisie secrètement au début du tour. Seul le fait de ne plus avoir qu’une carte en main ou de prendre le bon acteur peut vous permettre de retrouver cette liberté perdue. Lorsque l’on a joué toute la pile « rencontres », la saison prend fin. Chaque joueur gagne des écus en fonction de si sa pièce plaît ou pas au roi. Il peut aussi jouer une carte « demande secrète » qui lui donnera un bonus. On rejoue alors une saison, permettant à la fin de poser une deuxième carte « demande secrète », et c’est terminé.
C’est un jeu très sympa, même si beaucoup de mécanismes sont assez connus (choix secret de destination, annulation des effets si plusieurs au même endroit, avec ce phénomène de double-guessing, système de majorité pour l’emporter sur l’humeur du roi, etc.) Le tout est bien traité et bien mis en place, avec un savant dosage des différents éléments. Bien que l’on cherche un peu à pourrir le jeu des autres, on joue surtout pour soi, et les fourberies du titre ne sont donc pas légion. Ça reste quand même un jeu très compétitif, où il faut observer ce qui se passe autour et surtout les mouvements d’humeur du roi sur lequel tout le monde peut influencer. On se prend vite à l’ambiance et il est vraiment très agréable à jouer, assez fluide. Y’a bon.
Imagine
Et hop, on est là dans le party game, un de ces jeux à la Concept, où le système de scoring et les points sont finalement très secondaires, et où on s’amuse à faire deviner des mots aux autres. On reprend donc des cartes sur lesquelles figurent une liste de mots, et il faudra en faire deviner un (les règles disent que ton voisin choisit un numéro indiquant le mot que tu dois faire deviner, mais bon chacun fera à sa sauce). Il s’agit d’un jeu des japonais Hiromi Oikawa, Motoyuki Ohki et Shingo Fujita, illustré par Shintaro Ono, et édité par Moonster Games et Cocktail Games.
Parlons de la manière dont il faut faire deviner ces mots donc… Sur la table se trouvent éparpillées toute une collection de cartes transparentes avec une petite illustration basique sur chacune, un truc très schématique fait de polygones, de ronds, de pictogrammes, avec juste quelques couleurs. On va pouvoir assembler les cartes, les coller les unes aux autres, les unes sur les autres (puisqu’elles sont transparentes), et même les faire bouger pour animer notre création. Bien entendu, comme d’habitude avec ce genre de jeu, les quiproquos, les interprétations plus ou moins à côté de la plaque, les esprits parfois mal tournés, et les références obscures vont faire rire pas mal de monde. C’est du party game, c’est expliqué en peu de temps, c’est joué en combien de temps on veut (on fait le nombre de tours que l’on veut finalement), c’est fait pour s’amuser sans se prendre le chou. Tous les mots ne sont pas faciles, et le challenge peut être parfois poussé, mais toujours dans la bonne humeur. Et ça, j’aime.