Alors je vais commencer cet article par un grand merci à Cryl pour m’avoir prêté ce DVD. D-War, c’est un film dont j’avais beaucoup entendu parler sur les forums. Et là j’ai enfin eu l’occasion de voir ce grand moment de cinéma qui modifie mon échelle des valeurs pour estimer la qualité des films. Action, amour, humour, occultisme, monstres, légendes millénaires, tout y est pour créer un fabuleux cocktail qui vous transformera aussi. Le visionnement de ce film rend différent. Il y a un avant et un après D-War.
D-War, c’est tout d’abord une ancienne légende coréenne. D’immenses serpents magiques vivent sur notre terre. Et ce depuis des millénaires, et sans que la population ne s’en soit aperçue. parmi ces serpents il y a des gentils et des méchants, les uns cherchant à protéger la planète, les autres à détruire le monde. Déjà à ce stade, dès les premières minutes du film, on sent bien la profondeur et l’ambiguïté qui règne. Ce ne sont pas deux races opposées qui s’affrontent, mais au sein de la même race on compte des gentils et des méchants ; quelle magnifique déconstruction du concept de manichéisme! Tous les 500 ans, l’un de ces serpents se voit amené la lumière des cieux lui permettant de devenir un surpuissant dragon céleste aux pouvoirs terrifiants et qui peut changer l’avenir du monde. Il faut pour cela qu’il trouve une jeune fille qui, le jour de ses 20 ans, devient une concentration de pouvoir divin. Le serpent qui avale la fille devient alors dragon. Et bien entendu il y a des gardiens de cette jeune fille qui veulent l’amener au gentil serpent ; il faut la sacrifier pour le bien plutôt qu’elle ne meurt pour le mal. Et ici encore l’un des grands poncifs du cinéma est mis à mal : point de happy end ou de solution facile, la jeune fille doit mourir. Sans quoi elle sera encore et toujours pourchassée par les dragons (enfin, plutôt tous les 500 ans dans diverses incarnations). Les gardiens sont au nombre de deux, un ancien sage et son élève, tous deux guerriers redoutables ; et le jeune élève tombant amoureux de la jeune fille désignée refusera de la voir mourir dans la gueule d’un serpent. Ajoutons encore une armée de sombres séides aux ordres d’un cruel commandant soumis au méchant serpent et nous obtenons une solide base de légende formant un subtil socle à une histoire toute en finesse et complexité. De nos jours, à Los Angeles, on retrouve une nouvelle incarnation du jeune guerrier et de la jeune fille, aucun ne sachant vraiment qui ils sont ni ce qu’est leur avenir. Le vieux maître est aussi là et va rappeler le héros à sa tâche. Tandis que les méchants débarquent afin de s’emparer de la demoiselle en détresse. Va s’en suivre une série de hauts faits d’armes amenant à une conclusion poignante et touchante.
Mais D-War ne se résume pas à cette superbe intrigue délicate et finement taillée comme un diamant de valeur inestimable. C’est aussi une série de thèmes et d’approches psychologiques et mystiques qui permettent de mieux percevoir la place de l’Homme et son rôle. D-War nous rappelle que l’Homme est finalement bien peu de choses. Tout comme le brillant Mega Shark VS Giant Octopuss, D-War nous démontre que l’Homme reste bien faible face aux puissances de la Nature, ici représentées par ces terribles serpents. Malgré toute la puissance de feu qu’il peut mettre en place, l’être humain n’est qu’un faible pion dans le jeu des puissances divines, et nous ne pouvons qu’éprouver l’humilité qui sied à notre race lors du visionnement de ce film. Cessons de tergiverser et rendons-nous compte de l’inutilité de toutes nos avancées militaires et scientifiques : elles ne servent à rien. Seule la croyance et le statut d’élu peuvent aider l’Humanité en cas de réel coup dur. Ici, contrairement à la pauvreté des moyens humains évoquée dans Mega Shark, c’est justement l’ambition et la richesse voulue et recherchée qui nous est montrée par le réalisateur. Mais malgré cette débauche de techniques guerrières, nous ne sommes finalement que peu de choses. Dès lors, ce film attaque la question par une autre voie que Mega Shark…, cette fois en utilisant un bien plus grand nombre de décors et de figurants, ainsi que des moyens techniques et des effets spéciaux de bien plus grande ampleur. Reste que la faiblesse humaine s’exprime toujours au travers d’un jeu d’acteur volontairement pauvre et restreint à sa plus simple expression (voire moins encore).
La construction de D-War est aussi fort astucieuse. Débutant il y a 500 ans lors de l’incarnation précédente des héros, le film permet ainsi d’assimiler tous les éléments rapidement, plongeant ainsi le spectateur au cœur des questionnements de cette œuvre majeure. La transition avec notre époque est simple et bien traitée, ne perdant pas le spectateur comme cela est trop souvent le cas lors de changements temporels. On notera d’ailleurs que les quelques flashbacks émaillant le reste du film sont eux aussi d’une qualité sans faille aussi bien dans leur intégration à la narration que dans leur qualité et rigueur historique. La base de la légende coréenne n’est jamais prise en défaut, sans doute parce que le film est corréen, tout comme le réalisateur. Cette exactitude apporte une richesse inégalable. Le traitement de l’époque actuelle est tout entier dans une superbe progression de la découverte des secrets, avec une montée de l’action et de la tension, les scènes d’action se faisant de plus en plus grandioses, allant jusqu’à cette attaque terrifiante sur la ville de Los Angeles, symbole de notre monde si proche de la destruction. La tension palpable, le suspens haletant, tout cela se mêle au sein des tirs et des explosions, mais aussi des hurlements et de la panique. L’apothéose du film rejoint l’aspect mystique du début, dans une sorte de monde parallèle, sombre, territoire du méchant bien entendu, où toute cette débauche de fureur va trouver sa conclusion de la manière la plus simple qui soit. Magnifique et poignante fin qui transporte le cœur du spectateur et fera verser des larmes aux plus endurcis.
Il n’y a pas grand chose de plus à dire sur ce film. J’aurais aimé interviewer Bob à ce sujet, mais sa spécialité reste les livres de fantasy et il m’a dit ne pas vouloir s’immiscer dans un domaine qui n’est pas le sien.