J’avais beaucoup apprécié Janua Vera et Gagner la Guerre de Jean-Philippe Jaworsky (même s’il y a un peu de copinage là-dedans puisque le monsieur a beaucoup fréquenté les mêmes forums rôlistes que moi). « Même pas mort » n’est pas du tout lié aux deux précédents ouvrages puisque l’on est là non seulement sur une toute autre saga (il s’agit du 1er tome d’une série intitulée « Les Rois du Monde »), mais carrément dans un autre univers. Je dois dire que je ne suis de loin pas aussi emballé ici. D’entrée de jeu, on est plongé dans un monde qui semble construit, solide, avec ses peuples et ses tribus qui se mêlent en luttes et alliances depuis des siècles, et on y suit les pas de ce Bellovèse, descendant de roi, combattant qui a reçu une blessure mortelle sans être mort, et qui doit trouver une explication à tout cela. Après un premier chapitre très cryptique et un peu étrange, le bouquin revient en plusieurs étapes en arrière, avec des flashbacks engoncés les uns dans les autres, on va remonter le temps avant d’avancer de nouveau, on va passer par différentes étapes de la vie de notre héros pour le comprendre. Parce que oui ce bouquin est une suite de petits événements arrivés à Bellovèse, mais sans grande ampleur pour la plupart, on parcourt sa jeunesse, on le voit se construire, mais c’est un peu tout. Les ficelles de l’ensemble ne semblent pas vraiment se tenir entre elles, on ne voit pas trop l’intérêt de tout cela, le lien avec la situation actuelle, on a sur ces 464 pages une sorte d’introduction pour situer le personnage de Bellovèse. Et 464 pages de mise en bouche, c’est un peu long. Alors oui il y a des épisodes sympas à lire, il y a pas mal de passages prenants, mais qui auraient convenu aussi en nouvelles séparées plutôt que d’en faire une longue histoire où leur poids dans le développement narratif et dramatique est très léger. Et c’est vraiment dommage, parce que je pense que l’auteur a bien de bonnes idées là-derrière, sur ce qu’il compte faire de tout cela, mais là c’est difficile. Franchement, le tout début, le premier acte, m’a quasiment fait tomber le livre des mains tellement on ne voit pas d’où on vient ni où on va. La deuxième partie nous en donne un peu plus, mais ensuite, finalement il y a bien peu de choses qui font avancer le schmilblick.
Ce qui est dommage, c’est que j’ai l’impression de voir Jaworsy tomber dans certains aspects de la fantasy qui n’en sont pas les plus reluisants ni les plus sympas. Des noms souvent à rallonge, qui se ressemblent beaucoup et que l’on peut mélanger assez facilement (surtout quand certains personnages comme le frère du héros ont plusieurs noms). Ensuite il y a cette envie (compréhensible) de vouloir donne run maximum d’éléments sur son univers qu’il apprécie et qu’il a développé ; oui mais voilà les descriptions kilométriques qui n’amènent rien à l’histoire, c’est un peu long par moments. Surtout que, qualité et défaut à la fois, l’écriture de Jaworsky est de plus en plus poussée avec le temps ; le nombre de mots rares et ultra-spécifiques est ici très élevé, c’est parfois complexe, et pourtant je me permets de penser que j’ai une culture générale pas trop dégueu. Alors oui cela fait plaisir de voir un auteur qui manie la langue française avec autant d’aisance et qui a un vocabulaire aussi riche ; ne crachons pas là-dessus. Mais quand cela rend la lecture pénible et enlève de la fluidité, c’est peut-être trop. Mais franchement le contenu de l’histoire, ce qui fait envie d’en savoir plus, aurait pu tenir sur en gros un tiers du nombre de pages. L’auteur place tout cela dans un monde où il parle de celtes, il semble avoir tiré son inspiration dans peuple et une légende qui leur serait liée. Mais il faut bien reconnaître que quasi aucun nom de tribu ou de peuple n’a résonné à mon oreille, qui aurait pu me donner une accroche dans l’univers au lieu de me sentir submergé par un trop plein de nouvelles appellations et de termes complexes à chaque page.
Oui je me suis perdu dans « Même pas mort », oui j’ai hésité à laisser tomber le livre de mes mains à plusieurs reprises. mais j’ai continué à chaque fois, en me disant qu’on allait bien arriver à quelque chose, j’ai continué car je suis tombé sur quelques passages fort agréables quand même. J’ai attendu longtemps qu’il se passe vraiment quelque chose, que l’on accroche tous ces wagons pour en faire un tout solide, mais c’est l’aspect dissolu qui l’emporte. Et pourtant c’est dommage, comme je le dis, car je reste persuadé que l’intention était bonne et car l’auteur a écrit des bouquins qui m’ont vraiment emballé. Mais là je dis non, je n’ai pas croché.