En 1974, Un Justicier dans la ville (Death Wish en VO, titre du bouquin dont le film s’inspire) mettait en avant Charles Bronson en justicier, en vigilante comme on dit, qui va massacrer de la petite frappe dans les rues d’une ville où la police est dépassée suite à la terrible agression dont sa femme et sa fille ont été victimes. Ce film lancera la carrière de Charles Bronson et le style du vigilante movie, avec cette fameuse question de si on peut se faire justice soi-même et de s’il est acceptable de tuer quelqu’un. Un film dur et violent, donnant à son héros un comportement difficilement défendable. Quatre autres films ont suivi dans la franchise jusqu’à ce que l’idée de ce remake voit le jour.
Donc en 2018 débarque le remake où l’on retrouve Paul Kersey, aimable chirurgien très doué, père de famille aimant et aimé, avec sa petite vie coquette et friquée, tombant dans le malheur quand sa femme et sa fille sont violemment agressées. Face à une police qui piétine, il se découvre une âme de justicier qui va errer dans les rues d’une Chicago au taux de criminalité très élevé pour dézinguer de la petite frappe ; en espérant retrouver les agresseurs de sa famille pour leur faire payer. Pendant que la police se met sur ses traces aussi, et que tous les médis posent la question de sa légitimité et de son statut, puisqu’il devient une star.
Ce remake a connu une histoire complexe puisque cela fait 12 ans qu’on en cause à Hollywood. Divers réalisateurs et acteurs ont été pressentis au cours du temps, en particulier Stallone on Neeson devant la caméra, et Joe Carnahan (Le Territoire des Loups,…) comme réalisateur ; ce dernier est d’ailleurs toujours crédité comme scénariste même si son texte a été revu pour cette adaptation. C’est finalement Eli Roth (Cabin Fever, Hostel, The Green Inferno, Knock Knock,…) qui prend les commandes du film Même s’il n’est pas toujours dans les litres d’hémoglobine, le gore reste quand même son fond de commerce (même quand il est acteur, il se retrouve dans la violence, comme avec son rôle de grand malade d’Inglourious Basterds) ; et ça se voit ici avec quelques morts bien gratinées qui ne se gênent pas pour faire dans le sale, parce que bon une balle dans la tête avec beaucoup de sang c’est une chose mais il y a quelques autres scènes avec cervelle et tripaille au menu quand même.
Devant la caméra, on retrouve papy Bruce Willis qu’on ne présente plus, action-man invétéré depuis 30 ans (et le grandiose Die Hard) qui s’amuse même de son statut (Red) ; à 62 ans, il a toujours la pèche et rend très bien ce type souriant et heureux virant au taciturne, pris d’une soif de violence sourde et froide, déterminé, brutal, carré. A ses côtés, on retrouve le presque toujours bon Vincent D’Onofrio (Full Metal Jacket, Law and Order, Daredevil,…), Dean Norris (Breaking Bad,…), Kimberly Elise pour la diversité, Len Cariou, Elisabeth Shue (Retour vers le futur 2 et 3,…), Camila Morrone ou encore Kirby Bliss Blanton (The Green Inferno,…). Si le film tient essentiellement à son personnage principal, les autres qui gravitent autour ont leur importance et tous s’en tirent plutôt bien.
On notera au passage la bande-son très sympa, passant du rock qui claque au hip-hop qui tabasse, avec en tête de gondole le Back in Black d’ACDC quand même (un morceau qui donne toujours la pêche).
On a droit ici à un film correct. Ramassé, même court en comparaison des habituels blockbusters actuels (moins de 2h), il n’a pas besoin de plus. On n’est pas là pour diluer le truc. L’introduction certes assez longue permet de bien poser le personnage principal, de l’expliquer, de le découvrir, de s’y attacher, avant de souffrir avec lui. C’est ensuite son revirement que l’on vivra plus ou moins bien, que l’on acceptera plus ou moins, même s’il passe son temps à le justifier (et à se le faire justifier par sa psy). Ensuite l’action s’installe, le rythme s’accélère un peu, tandis qu’il se rapproche (le hasard fait bien les choses) des meurtriers de sa femme et que la police resserre le filet autour de lui. Avec ses quelques moments de pure violence très graphique (Eli Roth est dans la place), ce long métrage est un film de revanche, de vengeance. On a quelques moments franchement déplacés et malvenus (genre le coup de la boule de bowling), mais globalement le film fait le job. Sans plus. Bien sûr il pose la question (déjà valable il y a plus de 40 ans avec le film original) de la justification de cette justice personnelle. Mais il ne va pas très loin non plus dans ce sens, ne donnant pas de réponse claire (donnant même une absolution au héros à la fin, mais sans le mettre face à ses crimes, ce qui peut gêner l’opinion publique à une époque où les tueries sont de plus en plus fréquentes). Il manque quelque chose au film, clairement. Soit de passer au vrai film super violent avec davantage de morts et d’action, soit d’aller plus loin dans les questions de morale et de descente aux enfers du héros.
J’avais entendu parler d’une possible ouverture sur une franchise avec des suites comme avec le film original. Au vu de la réception critique, j’ai des doutes (mais un possible succès au box-office pourrait pousser le studio à y aller, même si je n’ai pas l’impression qu’on aille dans ce sens).