Dune

Dans un très lointain futur où l’Humanité a colonisé pas mal de planètes, quelques grandes familles tiennent les rênes du pouvoir. La planète désertique Arrakis (surnommée Dune par ses habitants) est sous la coupe de la brutale et violente Maison Harkonnen. Dans une belle magouille politique, l’Empereur les vire de la place pour mettre à la tête de la planète la famille Atréides. Mais pourquoi mettre autant de poids sur ce lieu bien précis? Parce que c’est le seul endroit où l’on peut exploiter l’Épice, une substance qui donne des capacités particulières et s’avère la plus recherchée de la galaxie, donc au centre de tout plein de machinations. On ajoute là autour du complot politique, des manipulations mystiques, divers groupes d’intérêt, etc. Bref, cela ne va pas se passer simplement.

Avec les bouquins, le film de Lynch de 1984, la mini-série de 2000, il y a de quoi faire pour que beaucoup de gens connaissent déjà l’histoire (sans parler du mythique projet avorté de Jodorowsky) ; en plus j’en ai profité pour lire le superbe mook à ce sujet. Et puis il faut dire ce qu’il en est, Dune est une œuvre majeure de la SF avec son lot de fans plus ou moins intransigeants qui vont donc s’en donner à cœur joie sur les qualités et défauts de ce film en comparaison des livres (syndrome Seigneur des Anneaux). Alors pour le rappel, oui ceci est une adaptation et n’a pas vocation à être une traduction littérale de l’entier du contenu (complexe parfois) des bouquins. En fait ce film reprend l’intrigue de la moitié du premier livre de la saga, et avec ses plus de 2h30 se doit quand même de couper dans certains éléments pour aller à l’essentiel et ne pas noyer les spectateurs. Des choix nécessaires pour que ça se tienne. Et le plus gros chantier là au milieu est de rendre ce film accessible à tout le monde, y compris ceux qui ne connaissent pas ; à mon avis c’est réussi (et j’en parlais hier avec quelqu’un qui justement a vu le film sans avoir lu/vu du Dune avant, qui m’a confirmé la chose, ou alors on peut voir aussi ce qu’en dit Alias) car l’essentiel est expliqué, et on a des éléments amenés petit à petit. Donc non, pas besoin de connaître l’œuvre pour venir découvrir le film ; mais il faudra quand même un peu s’accrocher, car même simplifié, l’univers reste dense et complexe.

Bon, ceci dit, passons à mon ressenti… ce film est une tuerie. C’est le genre de spectacle cinématographique, le genre de film qui réconcilie avec le cinéma en tant qu’art et qui redonne tout le plaisir d’aller en salle. Dune mérite un visionnement sur grand écran. Et on a droit à un grand spectacle réellement construit, artistique, qui nous sort des dorénavant envahissants blockbusters de super-héros qui définissaient le grand spectacle au cinéma depuis plusieurs années. Franchement j’ai été pas mal scotché sur mon siège, et il m’a fallu un petit moment pour réellement en sortir. J’aime beaucoup ce que fait Denis Villeneuve (Prisoners, Sicario, Premier Contact, Blade Runner 2049,…) et là je confirme que je le place parmi mes réalisateurs fétiches. Ce type réussit ici à rendre le côté grandiose, l’ampleur, la complexité, la vastitude de l’univers de Dune, mais aussi à se concentrer sur les personnages, à être au plus proche d’eux pour nous rappeler que ce sont eux les moteurs de l’intrigue. Après tout, deux des gros thèmes de Dune, c’est la manière dont une personne accède au pouvoir et est corrompue par lui, ainsi que le côté écologique à grande échelle : donc focus sur les personnages et grands paysages, on y est. Et il le fait avec brio, les images étant splendides. Des choix de couleurs, de cadrages, de photographie, qui sont franchement réussis. Tourné avec un minimum de fonds verts, dans des décors naturels grandioses pour une large partie, ce film offre un véritable spectacle et en envoie plein les mirettes. D’autant que les choix de design sont très bons aussi. Costumes, vaisseaux, architecture, objets, je n’ai pas l’impression d’avoir vu de vraie faute de goût. Je vais encore ajouter la superbe musique de Hans Zimmer qui pousse encore le truc plus loin et ajoute aux images l’expérience auditive (bon OK, quand je passerai le blue-ray sur mon home-cinema, les voisins vont me haïr).

Et puis il y a les acteurs évidemment, avec un casting quatre étoiles qui envoie du bois pour nous offrir de belles prestations. Si je dois émettre un bémol, c’est sur cette interprétation de Jessica qui me semble un peu plus pleureuse et geignarde que ce qu’elle aurait dû être dans mon souvenir, mais bon on fera avec. On a donc un film porté sur les épaules du jeune mais très talentueux Timothée Chalamet qui donne beaucoup pour ce personnage de Paul Atréides avec un jeu très juste ; je me réjouis de voir son évolution quand on sait ce que devient le personnage par la suite. A ses côtés, on retrouve Rebecca Ferguson (Mission Impossible, Life, Le Bonhomme de neige, Men in Black International,…), Oscar Isaac et sa prestance de fou (Sucker Punch, Drive, Ex Machina, Star Wars, Annihilation, Triple Frontier,…), Jason Momoa solide même sans sa barbe (Game of Thrones, Conan, Aquaman, Justice League,…), Stellan Skarsgard terrible et monstrueux (Pirates des Caraïbes, Thor,…), Josh Brolin avec sa gueule et son charisme (Les Goonies, Le Veilleur de nuit, Sin City, Sicario, Avengers, Deadpool 2,…), Javier Bardem toujours au taquet (Skyfall, Pirates des Caraïbes,…), Saron Duncan-Brewster, Chen Chang (Tigre et Dragon,…), Dave Bautista (Les Gardiens de la Galaxie, 007 Spectre, Blade Runner 2049, Hotel Artemis, Army of the Dead,…), Zendaya (Spider-Man Far from Home), ou encore Charlotte Rampling (Red Sparrow,…). Un casting fortement étoilé pour des personnages à la profondeur pas toujours aussi bien rendue que dans le bouquin. A nouveau, le réalisateur a dû faire des choix et trancher un peu, on regrettera par exemple la perte d’importance des Mentats.

Si je dois mettre un point négatif, c’est essentiellement celui de ne pas pouvoir enchaîner avec la suite. Le film s’arrête quand les choses s’accélèrent et prennent un gros virage. Et du coup cela peut laisser sur la faim. D’autant qu’aucune date (ni aucune confirmation d’ailleurs) n’est encore donnée pour la suite des opérations. On n’a plus qu’à croiser les doigts, car malheureusement le tournage des deux parties n’a pas pu se faire en une fois.

A noter aussi que certains pourraient être déçus. C’est de la SF oui, mais pas celle à laquelle on devient habitués. Ici, pas de bastons dans tous les sens, de gros ordinateurs, d’intelligences artificielles, de robots, de trucs rapides qui pêtent de partout. Oui il y a des combats, oui il y a de l’action. De temps en temps, fulgurante, brutale. Et qui fait des dégâts dans les rangs des personnages. Mais le film a aussi beaucoup de plans plus lents, plus calmes. Après tout, le cœur de cette histoire est dans l’intrigue politique et la manipulation. Et la véritable vedette est celle du titre : Dune, planète magnifiée sous la caméra de VIlleneuve, qu’il, faudra donc prendre la peine de découvrir.

C’est donc pour moi un excellent film. Bien sur on pourra toujours lui trouver des défauts, et on pourrait ergoter des heures sur la qualité de l’adaptation. Personnellement j’ai pris mon pied dans le fauteuil, j’ai rêvé les yeux écarquillés devant l’écran ; et je trouve les choix de Villeneve justifiés et solides. Le film tient bien la route. Je conseille donc plus que chaudement…

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