Après une saison 1 servant de véritable amuse-bouche, on entame le plat de résistance avec cette deuxième saison de 12 épisodes. Afin de ne pas perdre le spectateur, on reprend une brochette de mêmes personnages. Et on les déplace. Très rapidement, The Wire se montre moins comme une série policière que comme une série sociologique et urbaine. Ce petit bijou télévisuel se place comme une peinture de la ville de Baltimore, et généralement pas des beaux quartiers où tout va bien. La première saison nous avait montré le monde de la drogue, de sa distribution dans les quartiers, des junkies au pied des tours, des morts pour un oui ou pour un non, en brodant là-dessus l’histoire d’une bande de flics faisant son possible pour casser cela. La même bande de flics va cette fois se retrouver plantée sur un problème mêlant traite des blanches, proxénétisme, contrebande, recel, et encore et toujours la drogue. Et le spectateur de se retrouver plongé dans ce monde dur et froid, cynique. Le monde des dockers de Baltimore pour être plus précis (du moins en majorité, même si on retrouve nos amis de la bande de dealers de al saison 1 avec une galerie de personnages inoubliables). On y découvre la vie dure, celle où on se lève le matin en se demandant si on aura du travail, si on pourra payer son loyer, où on boit sans soif au bar du coin pour oublier ses soucis, où on ferme les yeux sur de petits trafics juste pour pouvoir mettre un peu de beurre dans les épinards, où on peut finir par mettre le doigt dans l’engrenage du crime organisé, de la drogue et des gangs, avec toutes les conséquences que cela peut avoir. Alors oui l’intrigue policière est toujours là, mais elle s’efface devant cette froide et dure peinture sociale qui donne toute sa profondeur à The Wire.
La série est toujours crédible. Dure mais crédible. En tout cas toujours nettement plus que les aventures super-héroïques de la plupart des flics du petit (et du grand) écran. Ici on rame, on se bat pour obtenir la moindre autorisation, on planque des jours pour rien (quand on n’oublie de vous rappeler si l’enquête avance), on se fait piéger par des boss pensant à leur carrière, la technologie affichée est réaliste et plausible (ah c’est sûr que les moyens techniques de CSI : Miami, ça fait science-fiction à côté). Mais on y croit et on ne peut que se sentir liés à ces flics. Et pas qu’à eux. Finalement tout le monde est humain. Le dealer qui organise son réseau comme une entreprise. Le pauvre type qui accepte des contrats illégaux pour loger sa femme. Le junkie qui passe sa journée à transporter du métal pour une dose bénie. Le chef de syndicat prêt à tout pour que sa corporation remonte la pente. Et j’en passe. Avec des acteurs tous au taquet pour assurer ces rôles solides. Le tout avec ses moments d’émotions extrêmement forts. Alors oui il y a de l’action et des coups de feu, mais dans The Wire les flics ne canardent pas à tout bout de champ ; un trafiquant rappelle même à ses sbire que sortir son flingue c’est faire en sorte que les flics s’intéressent à leurs activités. C’est réfléchi, solide et profond en bref.
Du coup c’est très dur aussi. The Wire est aux autres séries policières ce qu’un bon Havana Club Anejo est au rhum à deux balles que l’on mélange à du soda pour le faire passer. Ca se déguste en prenant son temps. C’est fort et ça peut brûler la gorge en passant. Il faut y aller à petite dose. Et ça vous prend les tripes. Avec une réalisation aux petits oignons, des intrigues léchées, une bande son de qualité et tout ce que j’ai déjà énuméré, je me demande pourquoi vous êtes encore en train de lire ceci et pas de la visionner? Et moi? Ah ben moi je retourne vers la saison 3 que l’on a déjà entamé à la maison… « On »? Ben oui, je la regarde avec Madame qui aime beaucoup.