On sait bien peu de choses sur notre protagoniste, si ce n’est qu’il semble faire partie d’un groupe de soldats d’élite. Il va se retrouver sur la piste d’un groupe de personnes qui semblent prêts à déclencher une terrible nouvelle guerre mondiale risquant de décimer pas mal de monde. Appuyé par un autre agent/espion/combattant, il va tenter de comprendre ce qui se passe, car on est ici dans une guerre temporelle, où il devient possible d’effectuer des actions « à l’envers », de retourner le temps.
Nolan a l’habitude de nous faire des films demandant de bien suivre, ne permettant pas de mettre le cerveau complètement à l’arrêt. Memento, Le Prestige, Inception, Interstellar, de très bons films (tout comme sa trilogie Batman même si elle retourne beaucoup moins le cerveau) avec un sens du spectacle indéniable. Avec Tenet, Nolan pousse encore plus loin sa logique et ses réflexions sur le temps. On n’est ni dans le voyage dans le temps, ni dans son ralentissement ou autre, mais dans un truc totalement neuf, difficile à expliquer mais visuellement très impressionnant. Cette inversion du temps laisse la place à de très belles idées visuelles, à des scènes marquantes. Mais franchement le concept, son utilisation scénaristique, son explication, reste un gros flou bizarroïde où on ne comprend de loin pas tout. Et comme c’est un peu le truc essentiel central au cœur du film et de l’intrigue, et bien le visionnement s’avère assez tordeur de neurones. A se demander si le scénariste/réalisateur ne pousse pas trop loin ses délires et ses idées tordues.
Reste que le final est impressionnant, un putain de grand spectacle qui envoie du bois. Dès sa scène d’ouverture dans l’opéra, on a droit à de l’action qui en jette et à des plans super bien posés. Les qualités esthétiques de Nolan sont toujours là et il sait poser des ambiances. Il sait où et comment mettre sa caméra pour nous pondre de belles images. Avec les effets des mouvements à l’envers, avec ces inversions, on obtient des moments qui claquent vraiment. En particulier les nombreuses scènes d’action qui se veulent épiques. Et puis il y a cette volonté de Nolan d’user au minimum d’effets spéciaux numériques. Quasiment tout se tourne en décors et effets réels, entre autres la fameuse scène de l’avion.
Le film est porté essentiellement par deux acteurs qui s’en sortent très bien, avec une bonne dynamique : John David Washington (Blackkklansman) et Robert Pattinson (Harry Potter, The Lost City of Z, malheureusement Twilight,…). J’ai un peu plus de peine avec l’antagoniste interprété par Kenneth Branagh (Harry Potter, Walkyrie, Good Morning England, Le Crime de l’Orient-Express, Dunkerque,…), ou avec le personnage de Elizabeth Debicki (The Man from UNCLE, Les Gardiens de la Galaxie 2, The Cloverfield Paradox,…) que je trouve trop fade. On peut encore parler de Aaron Taylor-Johnson (Kick-Ass, Godzilla, Avengers,…), Dimple Kapadia ou Martin Donovan (Insomnia), ainsi que du petit rôle d’un des acteurs fétiches du réalisateur, Michael Caine (Insaisissables, Kingsman,…)
Alors oui Tenet a de la gueule, c’est en soi un film d’espionnage/action avec un héros qui veut sauver le monde face à un grand méchant, le tout superbement emballé dans une réussite technique et esthétique. Mais au-delà de cela, on peut se demander si Nolan ne profite pas trop de sa notoriété pour vendre ses délires et les fruits de son imagination barrée que lui seul est apte à assimiler.
Attention spoiler :
La construction du film, comme son titre, en palindrome, résume la complexité de cette inversion, avec ces scènes qui se jouent deux fois, mais vues depuis deux bouts de la lorgnette. On le voit venir, avec le renversement au milieu, et le départ dans l’autre direction, mais tout tourne là autour et on a du coup un beau montage et un truc aux petits oignons pour que les scènes soient ainsi vécues dans les deux sens de la temporalité ; pas simple.